
Ce livre est né d’un agacement face à l’omniprésence, en politique suisse, du dogme de la soi-disant indépendance nationale, dit Joëlle Kuntz. C’est pourquoi, décortiquant, dès le 13e siècle, la dialectique dépendance/indépendance, l’auteur montre que jusqu’au 19e siècle, les Suisses se soucient surtout de conquérir un maximum d’avantages, au sein d’un empire non contesté en tant que tel. Le vrai génie des Suisses, démontre Joëlle Kuntz, c’est celui de la gestion optimale de leur dépendance envers leurs puissants voisins, «en s’appuyant souvent sur la bienveillance des uns, pour se prémunir contre l’hostilité des autres.»
L’indépendance, c’est l’Europe du Congrès de Vienne de 1815 qui va l’imposer à la Suisse, en même temps que sa neutralité. Dans la foulée de l’indépendance américaine, l’aspiration à l’indépendance nationale va bientôt devenir idéologique, en Suisse aussi. Pourtant, la dépendance de la petite Suisse reste une réalité. Il s’agit dès lors de «faire croire». Sommet de cette réussite en trompe l’œil: durant la 2e guerre mondiale, lorsque «le plomb de la dépendance totale s’est transformé en indépendance mythique et dorée», écrit Joëlle Kuntz
Malgré les proclamations persistantes d’indépendance, la Suisse en est aujourd’hui réduite à «l’application autonome des directives européennes» selon la formule officielle. Joelle Kuntz plaide quant à elle, pour l’acceptation de l’interdépendance entre partenaires également impliqués, à la fois comme réalité et comme idéal. Au terme du riche parcours qu’elle propose, l’auteur admet que l’époque, provisoirement espère-t-elle, reste peu réceptive à cette proposition d’avenir.
Éditions ZOE