L’histoire suisse en un clin d’œil par Kuntz Joëlle

Un best-seller qui donne une vision vivante et accessible d’une saga historique très complexe.

La préface laisse d’abord songeur. Tout en couvrant son auteure de louanges, Jean-François Bergier souligne la démarche « pour le moins insolite » de son livre, s’étonne de ses « raccourcis vertigineux », et trouve sa lecture de l’histoire suisse « volontiers provocante ».

L’historien livre cependant un point de vue de chercheur qui privilégie la précision scientifique avant la vision globale, qui tient aussi à prendre ses distances avec l’insolente liberté d’une non-professionnelle de la chose historique. Pour un journaliste ou un non-initié, la lecture de ce petit manuel a au contraire quelque chose de rafraîchissant et familier à la fois.

Journaliste et chroniqueuse au Temps, notamment responsable des pages Opinions du quotidien, Joëlle Kuntz réussit à rendre vivants et accessibles sept siècles d’histoire terriblement complexe.  Elle y parvient notamment grâce à des outils typiquement journalistiques. Par exemple, commencer par la fin en posant la Suisse d’aujourd’hui comme une énigme que l’histoire permet de comprendre. Son récit fait aussi la part belle aux conflits, tensions et ruptures qui ont marqués le pays. On connaît bien les oppositions confessionnelles, on se souvient moins des tensions économiques entre la banque et l’industrie, entre villes et campagnes, entre campagnes et montagnes, qui ont forgé la mentalité helvétique.

Enfin, malgré une entreprise qui tient forcément du survol, le livre s’attarde sur certains épisodes dont la mémoire collective n’a finalement pas retenu grand-chose. Ainsi du mercenariat guerrier, qui a tant nourri la Suisse du Moyen-Âge, mais a conduit les Confédérés à se battre les uns contre les autres et mené le pays à stopper net tout esprit de conquête, alors que les peuples environnants se lançaient à l’assaut du monde. Les Helvètes ont dès lors mis toutes leurs forces dans la conquête économique de la planète. Un « choix de civilisation » qui vaut plus que jamais.

Pierre-Louis Chantre

Zoé