L’impact de la presse gratuite par Barret Anne

Non, les journaux gratuits ne sont pas les fossoyeurs des journaux payants. Voilà en substance la conclusion à laquelle arrive cette étude très détaillée. Voilà aussi qui bat radicalement en brèche les prophéties émises par nombre de spécialistes lors de l’apparition de cette presse en France en 2002.

En 2005, l’Hexagone compte une demi-douzaine de quotidiens gratuits, dont une poignée de journaux régionaux. On y trouve aussi treize magazines du même type, ciblés sur sport, l’économie ou les préoccupations féminines. Ce seul constat donne la mesure d’un succès pour une presse qui n’a pas trois ans.

Cette presse gratuite n’a pourtant mordu que marginalement sur le marché des annonceurs de la presse payante. Rien ne permet non plus de penser qu’elle a enlevé un nombre significatif de lecteurs aux grands quotidiens traditionnels. Les journaux gratuits ont au contraire acquis de nouveaux lectorats du côté des jeunes et des femmes. Ils ont aussi investi des temps de lectures peu utilisés auparavant, notamment dans les transports en commun.

Qu’on regarde la chose à travers des données objectives ou des opinions, tout montrerait donc que cette nouvelle presse joue un rôle complémentaire. On pourrait même tabler sur la perspective que les nouveaux lecteurs, qui ne lisaient auparavant aucun journal, seront amenés à approfondir leur nouvel intérêt pour l’information… et se tourneront un jour vers les journaux payants.

Ecrit par une observatrice neutre, ce livre montre finalement que l’apparition des gratuits a principalement révélé les lacunes structurelles et journalistiques d’une presse écrite en plein déclin. Bousculée, cette dernière se voit obligée de réviser ses fondamentaux et de réfléchir à la manière de rajeunir son lectorat. On en viendrait presque à penser la presse gratuite comme un phénomène salutaire…

Pierre-Louis Chantre

Éditions Connaissances et Savoirs